Bakanja - ville News

REFUGE POUR LES ENFANTS DE LA RUE A LUBUMBASHI R.D.CONGO

lundi 31 décembre 2012

Ce n’est jamais impossible

Vers la voie de la réintégration familiale

En cette fin d’année 2012, la maison Bakanja-ville a accueilli des nouveaux et anciens jeunes qui viennent pour être aidés, en connaissant bien l’objectif de la maison qui n’est autre que celui de les faire sortir de la rue en vue de leur réinsertion social et familiale.

Il est parfois facile de parler de la réinsertion, mais la maison trouve le processus plus intéressant que la théorie. L’écoute et la compréhension sont souvent les clés de la réussite. C’est pourquoi de nombreuses activités à caractère spirituel sont organisées, qui visent toutes la conscientisation. Certes, en envoyant les jeunes à l’école  nous sommes convaincus que c’est déjà un pas vers la réinsertion. Puisque les parents de  ces enfants sont nos principaux partenaires  avec qui nous sommes appelés à collaborer, il s’avère plus qu’important  d’organiser des journées d’éveil et de conscientisation, comme celle du 15 décembre 2012.

Renouer les liens avec la famille

Ayant comme priorité de travailler avec les jeunes, comme le font les autres maisons salésiennes, Bakanja-ville travaille non seulement avec les  enfants mais aussi avec leurs parents ou tuteurs en vue d’une probable réinsertion familiale. Puisque notre maison est un bon cadre pour une bonne croissance morale des jeunes, nous ouvrons notre porte pour que celui-ci en venant toquer, trouve de l’aide soit en réintégrant de nouveau la maison familiale d’où il a fui, soit en trouvant un peu d’aide pour être scolarisé. Et cela se fait par la médiation, la conscientisation, la recherche de la famille. En vue de leur réinsertion, nous leur demandons d’aller passer les temps de Noël et Pâques en famille, ce sont des temps forts pour eux qui leur permettront de renouer petit à petit avec les leur (chaleur familiale).

Nos jeunes continuent à fréquenter Bakanja-centre pour l’école aussi longtemps que les démarches sont en cours : médiation, négociation pour une éventuelle réinsertion.

Les enfants trouvent dans notre maison un bon cadre, raison pour laquelle trois ou quatre arrivent chaque semaine, voire plus selon les périodes… A chaque nouvelle arrivée, il y a du pain sur la planche pour le corps éducatif, tout le monde s’y met : entrer en contact avec les tous nouveaux venus, chercher à créer un climat de confiance entre l’éducateur et l’éduqué, sans lequel il n’y aura pas d’éducation.

Aucune réinsertion n’est impossible

Pour la petite histoire, la maison Bakanja-ville avait accueilli par le passé un enfant d’à peine 8 ans répondant au nom Juma, orphelin de mère et abandonné par son papa polygame. L’enfant nous était arrivé en piteux état : mauvaise santé, mal habillé et mal en point. Nous avions pris du temps pour le remettre sur pieds. Depuis plus de sept ans, l’enfant  n’avait plus de nouvelles de son papa et seulement quelques rares  contacts avec ses oncles paternels  et son grand-père se trouvant toujours à Kalemie. Son grand frère, après avoir lui aussi passé quelques temps sur la rue, avait jugé bon d’habiter dans un foyer autonome. L’enfant étant en âge de fréquenter l’école, nous l’avions scolarisé dans plus d’une école de la place, car c’était un enfant intelligent mais difficile. Il a finalement obtenu un certificat de fin d’études primaires en 2012.

Un comportement difficile comme conséquence d’un manque d’affection familiale : il a connu la rue tout petit, tout petit il a appris à endurer la vie de la rue : atrocités, bizutage, drogue et que savons-nous encore ? Tout le monde disait de lui : « On en a marre, il faut se passer de lui ; qu’il mène sa vie, qu’on n’y mette une croix. »

Des ténèbres ont jailli une lueur d’espoir : après avoir déçu presque tout le monde par ses multiples forfaits, il a enfin décidé de renouer avec sa famille qui se trouvait à Kalemie. Il pensait que son papa était déjà mort, et qu’il n’avait personne sur qui compter si ce n’est son grand-père. Après conscientisation du jeune, les démarches furent entreprises de Lubumbashi pour tenter de retrouver sa famille. C’était une mer à boire pour nous puisque ni son grand-père, ni ses oncles paternels, n’étaient pas d’accord de récupérer le jeune puisqu’il  avait été sur la rue, de peur qu’il n’influence les autres enfants. Il fallu négocier sérieusement jusqu’à trouver une issue heureuse : « Nous sommes pauvres nous disaient-ils, au lieu de l’emmener ici à Kalemie, c’est mieux à Kinshasa où est son père, et puisqu’il est vivant, qu’il prenne ses responsabilités. » C’était la première fois que Juma apprenait que son papa était bel et bien vivant : « Donc il est vivant ? Je dois le rencontrer tout de suite ! Puis-avoir son numéro de téléphone ? Quand est-ce que je vais voyager pour Kinshasa ? J’ai aussi un papa, Dieu soit loué ! »

De Kinshasa les choses n’ont pas été faciles. Son papa également était content et ému, mais que faire pour sa réinsertion ? Etant marié à une autre femme qui n’aimerait pas la présence de Juma à la maison, il a souhaité que Juma aille habiter chez sa tante à Bukavu.  Les démarches ont mis plus de temps que prévu, on pouvait déjà deviner chez le jeune  un certain découragement puisqu’on allait de promesse en promesse. Il a changé de comportement et commencé à devenir dangereux  et pour lui-même et pour les autres enfants, sans oublier la prise de drogue. La maison Bakanja-ville ne s’est pas lassée de mener la médiation entre le papa du jeune et ce dernier, et finalement, le 18 décembre, nous avons eu son billet pour Bukavu. C’a été une joie énorme quand Juma a appris que son billet était prêt, et qu’il ne restait que les formalités administratives à remplir.

A 24h du voyage, on a reçu un coup de fil comme quoi la famille n’était pas prête pour accueillir le jeune à Bukavu et qu’il fallait l’emmener à Kinshasa où  est son papa. Comment s’y prendre pour ne pas décourager le jeune, et d’autant plus que le billet était déjà payé ? Force était de croire au savoir-faire de l’assistant social qui, grâce à lui  les négociations ont abouti sur une issue heureuse ; et le jeune a pu voyager le 19. Il continue à nous téléphoner nous disant qu’il va bien. Et surtout, il vit de nouveau parmi sa famille et a renoué avec l’école.          

mardi 25 décembre 2012

Lettre avec des nouvelles

  Bien chers amis,
 

Salutation cordiale depuis notre ‘Cher Congo’ !

Il est grand temps que nous vous donnions quelques nouvelles fraîches de nos œuvres.

Grâce à votre aide matérielle et financière généreuse nous avons pu accepter, à bras ouverts, chaque enfant qui s’est présenté.  Personne n’a été éconduit, aucune fille ni garçon en difficulté n’est resté devant la porte !  Cela n’a pas été toujours facile… mais chaque fois nous avons pu trouver une petite place, chaque fois nous avons pu ajouter un enfant…

Chaque jour nous préparons 1000 repas ! Chaque semaine 750 jeunes reçoivent un pain de savon !  Chaque mois nous payons une centaine de salaires…

Nous recevons, grâce à vous, non seulement de l’argent, mais c’est aussi plus de 20 tonnes de matériel qui nous est parvenu cette année !  Beaucoup de matériel de sport,  tout un stock d’imperméables,  des vélos pour enfants, du matériel scolaire…  Cette année nous avons aussi réalisé un projet de 250 arbres fruitiers à planter, et encore bien trop d’autres projets pour tous pouvoir les mentionner !  Toutes ces aides et ce beau matériel sont d’un grand secours à nos jeunes et allège bien notre travail.

Quelques faits marquants de l’année qui vient de s’écouler. 

Le point culminant de l’année 2012 à été la visite des reliques de Don Bosco en avril. 

En 2015, notre Congrégation fêtera le bicentenaire de la naissance de son saint patron.

Pour nous préparer spirituellement à ce jubilé, les reliques de Don Bosco font le tour du monde.  Nous aussi, ici à Lubumbashi, nous avons donc pu bénéficier de cette visite.  A Bakanja-ville, où a lieu le premier accueil des enfants en difficulté, nous n’avions prévu ni visite de Don Bosco ni festivité, et ce parce que nous avions pensé que nos garçons plus âgés qui prennent des narcotiques ne seraient pas réceptif à cet évènement.  Mais c’est justement eux-mêmes, ces jeunes souffrant d’addiction aux ‘drogues’, qui nous ont demandé : “Pourquoi, Don Bosco, ne vient-il pas chez nous ?  Nous sommes quand-même ses amis !”  Nous avons alors décidé de planifier le passage des reliques à Bakanja-ville et d’organiser, avec eux, en l’honneur de Don Bosco, une liturgie de prière.  Ah ! Nos chers ‘drogués’ n’avaient jamais été si heureux !  Et moi personnellement,  je pense que Don Bosco, de nouveau au milieu de ces garçons pour lesquels il avait donné sa vie, était lui aussi très content et a souri !   

Vous savez les difficultés que nous rencontrons à travailler en collaboration avec les autorités locales.

Cette année de nouveaux juges pour la jeunesse ont été nommés et, dorénavant,  si des garçons désirent entrer chez nous, ou si nous rencontrons pendant nos tournées de nuit des jeunes qui vivent dans la rue et qui cherchent une issue, nous sommes obligés d’en avertir le tribunal.  Nous pouvons ensuite garder ces garçons pendant un mois dans nos maisons, pour parler avec eux, commencer un travail de conscientisation, et pour prendre un premier contact avec leurs familles. 

Le juge qui suit Bakanja est venu nous rencontrer sur le terrain et nous a manifesté sa plus grande confiance, ce qui est très positif.  Après un mois chez nous, et après avoir effectué une enquête auprès de la famille (quand on a pu la retrouver), si on décide qu’un garçon ou une fille peut être placé dans une de nos maisons, alors le tribunal doit faire un document pour le placement.  Et c’est là que le bât blesse !  Comme nous ne nous ne voulons pas payer de ‘pourboire’ aux agents de l’Etat, nous devons parfois patienter des mois avant de recevoir ce document !!  La corruption est partout ! 

          Lors de nos visites dans les familles nous recevons des réactions très variées.  Un jour dans une famille, une maman nous a dit : “Pour moi, ce fils n’existe plus !  Je vous le donne en cadeau” …Ce type de réaction engage de longs pourparlers pour faire accepter à la maman de revoir son enfant et illustre bien une des problématiques auxquelles nous devons savoir faire face avec patience et confiance. 

          Mais il y a aussi des réactions très positives.  Ainsi, à 120Km d’ici, nous visitions une famille dont les parents pensaient que leur fils était décédé.  Quelle joie pour eux d’apprendre que leur fils était vivant ! Ils n’ont pas tué le veau gras comme dans l’évangile, mais le lendemain, il y avait une belle fête de famille et Bakanja-ville recevait 20$ et quelques pots de conserves pour nos garçons qui n’ont pas encore pu être placés ! Nous espérons que ce garçon s’accoutumera de nouveau à la vie de famille.

          Puis, il y a toujours nos ‘enfants sorciers’.  Ce sont les enfants qui sont accusés de ‘magie’.  Un jour un garçon de 10 ans arrive chez nous, il avait vécu quelques mois dans la rue et il voulait changer de vie.  Il voulait aller à l’école.  En composant son dossier et en examinant son état physique général, nous constatons qu’il a une cicatrice profonde à la tête.  Il nous explique alors  avec ses mots : “Ils m’accusent d’être sorcier.  Ils m’ont emmené chez le pasteur, et celui-ci pendant l’exorcisme, il tenait une bougie au-dessus de ma tête.  Mes cheveux prirent feu.  De là, cette cicatrice.”  Nous sommes allés voir la famille qui nous a confirmé que ce garçon disait bien la vérité.  Nous avons alors averti le tribunal.  Aujourd’hui le garçon évolue bien et nous  espérons qu’avec le temps il saura surmonter ce traumatisme. 

A Bakanja-Centre, cette année à été marquée par un progrès notable dans les installations. Ainsi, nous avons pu installer des panneaux solaires qui sont d’une grande utilité car chaque soir le centre souffre des grosses coupures de courant des services municipaux. 

A Bakanja-Ville il y a 80 internes et une infirmerie, c’était alors très difficile et quasi impossible de travailler dans l’obscurité !  Quelques locaux bénéficient aujourd’hui de panneaux solaires et nous sommes pressés d’avoir partout, dans les études et les dortoirs, le reste des installations solaires !


Le thème du mois des missions était “Des rencontres vous mettent sur le chemin”.  En effet, les enfants que nous rencontrons nous mettent sur le chemin.  Pour que leurs rêves d’avenir se réalisent nous les accompagnons sur ce chemin.  C’est chose magnifique que de redonner espoir aux jeunes.  Ils ne sont pas perdus pour la société et ils peuvent devenir eux-mêmes des acteurs d’un monde meilleur !
 
         Pendant les grandes vacances, quarante jeunes ont suivi une formation de construction écologique.  Les animateurs étaient des formateurs et architectes français et autrichiens.  Nous avons construit deux petites classes pour une école primaire.  Quelques ministres, des autorités, des diplomates… sont venus voir et remettre les diplômes en fin de formation.  Nos garçons étaient très fiers, eux qui étaient jusqu’alors considérés comme les parias de la société se trouvaient tout à coup au centre de l’attention.  De telles expériences leur donnent confiance en eux et les font grandir !

Chers amis, vous qui aimez nos garçons, recevez notre reconnaissance à tous pour l’aide financière et matérielle que vous nous apportez et sans laquelle nous ne saurions effectuer nos missions.  Soyez-en certains: “Aider… ça aide!”